abdelhalim berri المدير العام
الإسم الحقيقي : Abdelhalim BERRI البلد : Royaume du Maroc
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| موضوع: La Poudre aux yeux Acte II---Scènes -12-13-14 الأحد 27 فبراير 2011, 21:59 | |
| Scène XIIRatinois, MalingearRatinois, à part. - Nous voilà seuls... Ce n'est pas commode à attaquer, cette affaire-là!...Malingear, à part. - Comment diable aborder la chose?...Ratinois, s'approchant. - Mon cher Malingear, c'est bien aimable à vous d'avoir accepté notre petit dîner.Malingear. - Vous y avez mis une insistance si affectueuse!...Ratinois. - Oh! c'est que je vous aime, moi!Malingear. - Moi aussi, allez!Ratinois, lui serrant la main. - Ce bon Malingear!Malingear, de même. - Excellent Ratinois!Ratinois, à part. - Tout ça, c'est du sentiment... ça nous éloigne! (Haut.) Tantôt, nous avons causé de la dot un peu superficiellement...Ils s'asseyent près de la table à gauche.Malingear, à part. - Il y vient de lui-même! (Haut.) En effet, très superficiellement... Vous avez parlé de cent mille francs.Ratinois. - Oh! C’est un chiffre que j'ai jeté... comme ça en l'air... mais ça ne vous lie pas.Malingear. - Je disais aussi... un gros raffineur...Ratinois. - Et vous, un médecin illustre... qui reçoit quatre mille francs d'un coup!...Malingear. - Oh! Moi?...Ratinois. - Je les ai comptés... Tenez, je suis disposé à faire un sacrifice... Je donnerai l'argenterie!Malingear, étonné. - Ah!Ratinois. - Et vous?Malingear. - Moi?... J'offre la garniture de cheminée du salon.Ratinois, étonné. - Ah! (A part.) Il faut lui mettre les points sur les i! Malingear, il faut nous dire une chose... c'est que tout a augmenté.Malingear. - C'est vrai; et tel qui était à son aise autrefois avec dix mille francs de rente se trouve aujourd'hui fort gêné.Ratinois. - Voilà! Et nous ne voulons pas que nos enfants soient gênés...Malingear. - Certainement nous ne le voulons pas.Ratinois. - Voyez-vous votre fille, votre fille chérie, obligée de regarder à s'acheter une robe ou un cachemire?Malingear. - Et votre fils... votre fils unique, réduit à vivre d'expédients?Ratinois. - Oh! ne parlons pas de mon fils... Un homme se tire toujours d'affaire... Mais elle... la pauvre enfant!... qui est votre joie, votre amour... car vous l'aimez bien votre fille?Malingear. - Presque autant que vous aimez Frédéric.Ratinois. - Oui... Ne parlons pas de Frédéric... parlons d'Emmeline... Il faut lui faire, à cette enfant, une existence de soie et d'or.Malingear, pénétré. - Oh! Merci pour elle!Ratinois. - D'où je conclus qu'il y a lieu d'augmenter la dot.Malingear. - C'est tout à fait mon sentiment.Ratinois. - Eh bien... fixez vous-même... J'accepte d'avance.Malingear, à part. - Ah! Très bien!... Parlez-moi des commerçants. (Haut.) Je pense qu'en donnant cent cinquante mille francs...Ratinois. - Ah! Malingear... ce n'est pas assez!Malingear. - Alors, mettons deux cent mille.Ratinois, se levant. - C'est convenu! Moi, je donne l'argenterie, et vous deux cent mille...Malingear, se levant. - Comment!... C'est vous qui les donnez.Ratinois. - Moi? Par exemple!Malingear. - Pourquoi moi et pas vous?...Ratinois. - Parce que, dans votre position... un homme qui a voiture, loge aux Italiens et un chasseur!Malingear. - Mais vous avez aussi une voiture, une loge aux Italiens, et un nègre... ce qui est plus cher!Ratinois. - Moi, moi!... Ce n'est pas la même chose!Malingear. - Pourquoi?... A moins que vous n'affichiez un luxe au-dessus de votre position?...Ratinois. - Du tout! Elle est superbe, ma position!... Elle est magnifique, ma position!Malingear. - Eh bien, il est de toute justice que nous donnions autant l'un que l'autre... Chacun deux cent mille francs... (A part.) J'ai vingt-deux mille livres de rente, il m'en restera douze.Ratinois, à part. - Saperlotte! J’ai dix-sept mille livres de rente, il ne m'en restera que sept! C'est impossible!Malingear. - Vous hésitez... pour une misérable question d'argent?Ratinois. - Je n'hésite pas! Cent mille francs de plus ou de moins... qu'est-ce que vous voulez que ça me fasse? J'offre trois cent mille francs! Voilà comme j'hésite!Malingear, étonné. - Hein!... trois cents?...Ratinois, à part. - Je vais le pousser jusqu'à ce qu'il recule... et, alors, je romps!... (Haut.) Vous reculez?...Malingear. - Du tout, je réfléchis... (A part.) Trois cent mille francs, c'est impossible!... Il n'y a qu'un moyen; c'est d'élever la dot jusqu'à ce qu'il dise non... Alors, tout sera rompu... (Haut.) je propose quatre cent mille.Ratinois. - Ce n'est pas assez... Cinq cent mille!...Malingear. - Ce n'est pas assez... Six cent mille!...Ratinois. - Ce n'est pas assez...Scène XIIILes Mêmes, RobertRobert, paraissant avec un oranger. - Quoi! Six cent mille francs?...Ratinois, à part. - L'oncle Robert! J'allais lâcher le million! Je l'aurais lâché... (Haut.) M. Malingear, le futur beau-père.Malingear. - Nous causions de la dot.Robert, posant son oranger. - Comment!... Et vous donnez six cent mille francs?... (Le saluant.) Ah! Monsieur, permettez-moi de vous féliciter.Malingear. - Mais M. Ratinois en donne autant!...Robert - Comment, toi?Ratinois, embarrassé. - Naturellement.Robert, à Ratinois. - Mon compliment! Je ne te savais pas aussi riche que cela!Ratinois. - Aussi riche! Aussi riche! Certainement, je suis à mon aise... mais, quand on se trouve en face de gens... millionnaires... qui ont des exigences...Malingear. - Ah! Permettez, monsieur... je n'ai rien exigé... C'est vous, au contraire, qui...Ratinois. - Moi?... J'ai proposé l'argenterie, et, là-dessus, vous êtes parti...Malingear. - Comment! Je suis parti?... J'ai dit que je donnerais la garniture de cheminée du salon... et vous m'avez répondu "Ah!" froidement.Ratinois. - J'ai répondu: "Ah!...", c'était mon droit; mais pas froidement.Malingear. - Ah! Permettez, monsieur...Ratinois. - Permettez vous-même...Robert. - Enfin, vous êtes d'accord?...Ratinois. - Nous sommes d'accord... si on veut!... Mais je n'ai pas répondu froidement.Malingear. - Je vous demande pardon!Ratinois. - Non, monsieur!Malingear. - Si, monsieur!Ratinois. - Tenez, voulez-vous que je vous dise ma façon de penser?Malingear. - Vous me ferez plaisir.Ratinois. - Eh bien, vous cherchez un biais pour rompre ce mariage.Malingear. - Comment, un biais?...Ratinois. - Un biais! je maintiens le mot. Mais moi, qui suis un honnête homme...Malingear. - Pas plus que moi!Ratinois. - C'est possible! Mais comme je ne veux pas de biais, moi, je vous dis tout net...Tous deux, ensemble. - Rompons!Robert. - Voyons, messieurs, pas d'emportement!Ratinois. - Je ne m'emporte pas! (A part, avec satisfaction.) Ca y est! C’est rompu!Malingear, à part, avec satisfaction. - C'est une affaire terminée!Robert. - Diable! Vous allez vite en affaires! Une rupture! (A Ratinois.) Heureusement que ton fils n'aimait pas mademoiselle Malingear, n'est-ce pas?Ratinois. - Il ne l'aimait pas?... il ne l'aimait pas!... c'est-à-dire si... il en était fou! Mais qu'est-ce que cela fait?Robert, à Malingear. - Et mademoiselle Emmeline n'était que médiocrement éprise de Frédéric?Malingear. - Médiocrement... c'est-à-dire... elle paraissait avoir un certain penchant pour lui... Je ne le cache pas... mais...Robert. - Mais qu'est-ce que cela fait, n'est-ce pas?Malingear. - Je n'ai pas dit cela, permettez...Robert, éclatant. - Non, je ne permets pas!... Vous êtes des vaniteux, des orgueilleux!...Malingear. - Monsieur!...Ratinois. - Mon oncle!Robert. - Ah! Voilà un quart d'heure que je me retiens... il faut que ça parte!... Vous cherchez, depuis quinze jours, à vous éblouir, à vous mentir, à vous tromper...Tous deux. - Comment?...Robert. - Oui, à vous tromper, en vous promettant des dots que vous ne pouvez pas donner. Est-ce vrai?... En vous pavanant dans une existence, dans un luxe qui n'est pas le vôtre!Ratinois. - Mais...Robert. - Il n'y a pas de mais!... J'ai fait causer tes domestiques! Quand je veux savoir, je cause avec les domestiques... c'est mon système!Ratinois. - Qu'ont-ils pu vous dire?Robert. - D'abord, j'ai rencontré un nègre dans la cuisine... Un nègre qui traîne dans une cuisine... c'est malpropre! Et puis Monsieur a pris une voiture au mois, une loge aux Italiens! Ratinois aux Italiens!Ratinois. - Mais il me semble que c'est un théâtre...Robert. - Qui t'ennuie!Ratinois. - Ah!Robert. - Je te dis que ça t'ennuie... et ta femme aussi!... (Montrant Malingear.) Et Monsieur aussi!Ratinois. - Eh bien, oui! Là! C’est vrai!Malingear. - J'avoue que l'opéra italien...Robert. - Alors, pourquoi louez-vous des loges?...Malingear. - C'est ma femme...Ratinois. - Ce sont ces dames...Robert. - Pour faire de l'embarras, du genre, du flafla! Aujourd'hui, c'est la mode; on se jette de la poudre aux yeux, on fait la roue... on se gonfle... comme des ballons... Et quand on est tout bouffi de vanité... plutôt que d'en convenir... plutôt que de se dire: "Nous sommes deux braves gens bien simples... deux bourgeois..." on préfère sacrifier l'avenir, le bonheur de ses enfants... Ils s'aiment... mais on répond: "Qu'est-ce que cela fait?..." Et voilà des pères!... Bonsoir!...Il veut sortir.Ratinois, le retenant vivement. - Mon oncle Robert, restez!... (Emu.) Mon oncle Robert... vous avez des boucles d'oreilles... vous n'avez pas d'esprit, vous n'avez pas d'instruction... (Se frappant le cœur.) Mais vous avez de ça!Malingear. - Oh! oui.Ratinois, très ému. - Vous m'avez remué... vous m'avez bouleversé!... Vous m'avez prouvé que je n'étais qu'un père à jeter par la fenêtre. (Montrant Malingear) et Monsieur aussi... Mais ce n'est pas ma faute... c'est la faute de ma femme; elle me le payera!... (S'attendrissant.) Et je vous jure que si jamais... au grand jamais... vous me voyez broncher dans le chemin qui... que... qui... (Tout à coup.) Enfin, voulez-vous dîner avec nous?...Scène XIVLes Mêmes, Madame Malingear, Madame Ratinois, Emmeline, Frédéric; puis Le Maître d'HôtelMadame Ratinois. - Eh bien, monsieur; vous nous laissez seules?...Ratinois. - Ah! Voilà ma femme! Approchez, madame.Malingear, à sa femme, sévèrement. - Approchez, madame.Madame Ratinois. - Quoi?...Madame Malingear. - Qu'y a-t-il?...Ratinois, à sa femme. - Mère coupable... et bouffie de vanité!... Mais c'est la mode aujourd'hui!Malingear. - On fait la roue!Ratinois. - On se gonfle comme des ballons!Malingear. - Et l'on ne craint pas de sacrifier l'avenir, le bonheur de ses enfants!Ratinois. - Car ils s'aiment... Mais on répond: "Qu'est-ce que cela fait?" Et voilà des mères! Bonsoir.Madame Malingear. - Ah çà! qu'est-ce que vous avez?...Madame Ratinois. - Explique-moi...Ratinois, avec véhémence. - Prends ton tricot!... Car elle tricote tous mes bas de laine, monsieur!Il passe devant sa femme.Malingear, de même. - Mais ma femme aussi, monsieur!Madame Ratinois. - Comment! vous, madame?Ratinois. - Mais oui!... A bas les masques!... Ratinois, ancien confiseur... pas raffineur!...M. et Madame Malingear. - Comment?...Madame Ratinois. - Mais, mon ami...Ratinois. - Laisse-moi tranquille! Au Pilon d'argent (elle tenait le comptoir). Donne cent mille francs de dot à son fils!Malingear. - A mon tour! Malingear, docteur sans clientèle!Madame Ratinois. - Comment?Ratinois. - Mais la duchesse?...Malingear. - Je n'ai soigné qu'un cocher cette année, et gratis... Donne cent mille francs de dot à sa fille!Robert. - A mon tour!... Robert, marchand de bois, venu à Paris avec douze sous dans sa poche, donne cent mille francs de dot à son neveu!Frédéric. - Ah! mon oncle!Emmeline. - Mon bon oncle!Ratinois. - Il a de ça!Le maître d'hôtel, entrant. - Le dîner est servi!Robert. - Allons, à table!Ratinois. - Un instant!Tous. - Quoi donc?...Ratinois. - C'est que j'ai commandé un dîner insensé... j'en suis honteux!... Six plats de truffes!...Tous, avec reproches. - Oh! Ratinois!...Malingear. - Un père de famille!...Ratinois. - On pourrait peut-être les faire reprendre à M. Chevet?Tous. - Oh! non!Robert. - Je m'y oppose!Ratinois. - Allons, mangeons-les!... ce sera notre châtiment! A table! La main aux dames!...On offre le bras aux dames, et l'on passe dans la salle à manger.RIDEAU | |
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