#1 13/09/2004, 17h21
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widady
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Date d'inscription: septembre 2004 Messages: 3 Likes: 0
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Le Maroc et la drogue
l'Union européenne et certains pays membres (Espagne en tête) dénonçaient le laxisme marocain en matière de drogues et d'émigration clandestine. Depuis quatre ans, Bruxelles tire argument du manque de preuves de bonne volonté des autorités chérifiennes pour geler tout investissement dans le plan marocain d'éradication des cultures de cannabis et de développement des provinces du Nord (la participation demandée s'élève à 2 milliards de dollars sur 5 ans). L'"assainissement", de même que le (laborieux) lancement de l'Agence de développement des provinces du nord (ADPN), chargée de mettre en œuvre le plan de développement, avaient pour but de lever ces réticences ;
la Banque mondiale et le FMI, après avoir longtemps considéré le Maroc comme un bon élève (l'ajustement structurel s'est théoriquement achevé en 1992), s'inquiètent de l'absence de politique économique, de la santé précaire des finances publiques et de la part croissante des secteurs informels et illicites dans la vie du pays. Ce alors que l'intégration croissante du Maroc aux échanges avec l'Union européenne et donc son acceptation des règles du jeu libéral, supposeraient la mise en œuvre de réformes profondes. La mise en scène des campagnes d'assainissement est un moyen de gagner du temps.
Il est trop tôt pour déterminer si les actions menées ont porté leurs fruits à l'extérieur. Mais Rabat peut d'ores-et-déjà compter sur le soutien de la France et de l'Espagne. En mai 1996, Paris confirmait l'annulation de 1 milliard de francs de dettes marocaines, à convertir en investissements dans le développement du Nord du royaume, alors que la Caisse française de développement débloquait un crédit de 800 millions de francs pour le financement de projets dans la même région jusqu'en 1998. En décembre, c'était au tour de Madrid de convertir 40 % des dettes (soit 520 millions de dollars), toujours pour le financement de projets dans le Nord.
Mais l'enjeu de la "campagne" est aussi - et peut-être surtout - interne. Sous un régime autocratique où le jeu politique est totalement bloqué, vidé de contenu, les seuls enjeux de pouvoir résident dans les domaines économique et financier. Jusqu'à présent, la monarchie avait pu se contenter de laisser se développer, en s'efforçant de les contrôler, des activités illicites qui permettaient de désamorcer les tensions liées à la crise économique et sociale, notamment dans un Nord délibérément livré à lui-même par l'administration. Mais, depuis une décennie, le trafic de haschisch est devenu la première source de devises du pays et la contrebande représente au moins le tiers du PIB.
Pour reprendre l'expression de Béatrice Hibou, chercheur au Centre d'études et de recherches internationales (CERI - Fondation nationale des sciences politiques), loin de n'être que le "lot de consolation des petits", trafic de drogues et contrebande sont devenus "le nouvel Eldorado économique de puissants et riches personnages". La campagne d'assainissement permet au pouvoir central une démonstration de force dans le champ de l'informel, comme à l'époque où le sultan lançait ses troupes pour razzier les régions dissidentes, quand celles-ci refusaient de faire allégeance en négociant l'impôt annuel. "On peut, analyse le CERI, lire la réaction actuelle du pouvoir marocain à la fois comme la prise de conscience de l'autonomisation croissante de la société et comme une tentative de reprise en main". Il s'agit "d'éviter l'épanouissement des potentiels de dissidence et de tenter de redessiner de nouvelles formes d'allégeance".
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