I- Le discours direct:
1. Définition:
C'est un discours rapporté tel qu'il a été prononcé réellement, ou tel qu'il est censé avoir été prononcé par des personnages fictifs. Dans un récit, l'insertion de paroles rapportées au discours direct constitue une rupture; ce n'est plus le narrateur qui parle mais un de ses personnages; les paroles rapportées au discours direct font référence à la situation d'énonciation du personnage, en aucun cas à celle du narrateur.
2. Repérages:
Le changement de locuteur est indiqué par des guillemets ou des tirets. La ponctuation reproduit le ton et l'intention du nouveau locuteur peut être précisée par la présence d'un verbe de parole ou de pensée (dire ou l'un de ses synonymes) situé avant le propos, après le propos, ou en incise à l'intérieur du propos. On appelle proposition incise la proposition qui contient ce verbe de parole (attention, le sujet y est toujours inversé).
Exemple:
« Eh bien ! ajouta-t-il, la peau de l'animal ?
Mais que t'a-t-il dit à l'oreille ?
Car il s'approchait de bien près avec sa serre.
— Il m'a dit qu'il ne faut jamais
vendre la peau de l'ours qu'on ne l'ait mis par terre. » (Jean de La Fontaine, Fables)
3. Effets:
Le discours direct rend le nouveau locuteur plus présent; il permet de le caractériser en fonction de ses dires; et il cherche à faire vrai puisqu'il veut reproduire les propos fidèlement, sans déformation.
II- Le discours indirect:
1. Définition:
Le discours indirect évite le changement de système d'énonciation; le propos rapporté ne prend pas la place du discours premier, il lui est subordonné; elles se présentent d'ailleurs grammaticalement sous la forme d'une proposition subordonnée ou d'un groupe infinitif prépositionnel dépendant d'un verbe de parole.
Les paroles rapportées au discours indirect relèvent donc du même système d'énonciation que le reste de la narration.
Exemple: L'un de nos deux marchands de son arbre descend, court à son compagnon, lui dit que c'est merveille qu'il n'ait eu seulement que la peur pour tout mal. » (Jean de La Fontaine, Fables)
2. Repérages:
Grammaticalement, le discours indirect dépend du verbe de parole ou de pensée auquel il est relié par la conjonction de subordination "que". On observe des changements de temps, de pronoms, d'indicateurs spatio-temporels, par rapport à ce que serait le propos s'il était en discours direct.
3. Effets:
Le discours indirect rend le deuxième locuteur plus lointain. Il donne ainsi au locuteur premier l'autorisation de ne pas reproduire tels quels les propos du locuteur: il peut les résumer pour en rester à l'essentiel, ou les reformuler d'une autre façon, voire les transformer.
4. Le discours entièrement narrativisé:
Lorsque le narrateur veut seulement indiquer brièvement ce qui s'est verbalement passé sans rapporter les propos, il abandonne le discours indirect pour un discours entièrement narrativisé, qui supprime même la reprise indirecte des paroles.
III- Le discours indirect libre:
1. Définition:
Comme le discours direct, il rapporte exactement les paroles ou les pensées, mais sans indiquer un changement du système d'énonciation.
Exemple:
« Deux compagnons, pressés d'argent,
À leur voisin fourreur vendirent
La peau d'un Ours encore vivant,
Mais qu'ils tueraient bientôt, du moins à ce qu'ils dirent.
C'était le roi des ours, au compte de ces gens.
Le marchand à sa peau devait faire fortune ;
Elle garantirait des froids les plus cuisants :
On en pourrait fourrer plutôt deux robes qu'une. » (Jean de La Fontaine, Fables)
2. Repérages:
Le discours indirect libre supprime les guillemets, marques du discours direct, et les temps des verbes deviennent ceux du discours indirect, sans subordination. De ce fait, il est parfois difficile d'établir la distinction entre ce qui appartient au locuteur premier, et ce qui appartient au locuteur second. Souvent, il vient après un discours indirect introduit par "que", ou après une remarque sur l'état d'âme du personnage; c'est alors un moyen de le repérer.
3. Effets:
Assez fréquent chez La Fontaine, au XVIIe siècle, le discours indirect libre apparaît surtout dans le roman, à partir du XIXe siècle. Comme le discours direct, il donne au personnage de la présence, et le caractérise. Mais il permet aussi de conserver cette présence même lorsqu'il s'agit d'un propos général prononcé par aucune personne particulière, mais représentatif d'un groupe, d'un type social.
4. Le monologue intérieur:
On parle de monologue intérieur lorsque le discours indirect libre rapporte longuement la pensée d'un personnage.
Le monologue intérieur est donc une technique littéraire censée exprimer le cheminement désordonné de la pensée intime, non pas du point de vue extérieur (oral avec un ou plusieurs auditeurs) d'un personnage mais d'un point de vue intérieur.
Le lecteur est installé dans la pensée du personnage qui devient narrateur. Le déroulement ininterrompu du monologue se substitue à la forme usuelle du récit. Le monologue intérieur joue un rôle important dans le renouvellement du roman au XXe siècle devenant « l'un des emblèmes de la modernité romanesque » (J.-P. Bertrand).
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