Écrire un monologue autour des variations de la marcheAuteur du dispositif : Marie-Claude Denjean
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. Mots-clefs : thème de la marche – écriture de monologue.
.*Texte source : monologue de Christian Rullier, Il marche, Editions théâtrales
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Étapes du dispositif :
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Étape 1
- Distribution à chaque participant d’une feuille format A3 divisée en deux parties.
- Écriture sur la première partie de la feuille Format A3, travail sur le thème de la marche…
- Établissement de trois colonnes autour des items : mots, pensées, expressions connues ou imaginaires qui relient où amènent à la marche. Temps d’écriture : 10-15 minutes.
- Exploitation orale, lecture partagée : chacun, à tour de rôle, lit en notant au passage quelques mots, pensées, expressions connues ou imaginaires des autres participants.
- Temps de lecture : 30 minutes (suivant le nombre de participants).
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Étape 2
Lecture : le groupe sera divisé en 2. Le groupe 1 lira une partie des extraits du monologue Il marche, de Christian Rullier, au groupe 2 qui, lui, écoutera les textes et relèvera des mots, uniquement des mots, qu’il écrira sur la deuxième partie de la feuille format A3 autour de :
…Sur tout ce qui fait que le vivant va. Et inversement le groupe 2 lira au groupe 1 l’autre partie des extraits du monologue Il marche, de Christian Rullier, et le groupe 1 relèvera également des mots, uniquement des mots, qu’il écrira sur la deuxième partie de la feuille format A3 autour de : …Sur tout ce qui fait que le vivant va. Temps de lecture : 30 minutes.
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Étape 3
- Écriture : il sera demandé aux participants, en tenant compte de ce qu’ils ont écrit et retenu de la lecture collective, d’écrire un monologue autour des Variations de la marche. Temps d’écriture : 30 minutes-35 minutes.
- Temps de réflexion pour chacun, sur la mise en espace (pour ceux qui le désirent) de leur monologue : 10 minutes.
- Temps de lecture : 30 à 45 minutes (suivant le nombre de participants). Marie-Claude Denjean a demandé à tous les participants de garder tous les monologues produits en cours d’atelier, dans le but d’en faire un monologue unique. Dans un autre temps, il aurait pu être envisagé, avec les participants désireux de le faire de travailler, la mise en espace de ce monologue.
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Exemple de texte issu du dispositif :
LES VARIATIONS DE LA MARCHE – petit monologue –
Un jour, lorsque j’étais enfant, j’ai joué au théâtre. On m’avait donné le rôle du fil de feriste. J’étais Roméo, qui devait rejoindre Juliette sur une île au milieu du fleuve. Je ne savais pas nager, ni ramer. Comme c’était une pièce qu’on avait écrite en atelier d’écriture, il y en avait qui avaient décidé que Roméo ne pouvait marcher sur les eaux, comme un autre. Et que donc la seule solution , c’était le fil de fer ; Il a bien fallu apprendre le rôle – ç’a été conjuguer le verbe au pire. Mon père a tiré des fils entre mon lit et ma table, entre la table et le lavabo, entre le lavabo et la cuisine etc., j’ai commencé de pratiquer des variations sur la marche : sur le fil, sous le fil, le long du fil, sans le fil… A quatre pattes, avec une canne, sur les mains, sur la tête… cette responsabilité verticale fut le premier pas vers une imitation véritable d’un funambule qui franchissait les chutes du Niagara avec une charlotte au coulis
de framboises dans chaque main. Mais tout ça, c’était quand j’étais enfant. Maintenant, je suis
dans un fauteuil roulant. J’y suis arrivé après une longue marche. D’abord à quatre pattes, sur le tapis du salon, au milieu de la famille qui disait en me voyant : « il ira loin, ce petit ».
Ensuite, ils m’ont mis sur ce putain de fil de fer, à jouer Roméo courant après une Juliette trop maigre. Les scouts ont suivi, punition parce que j’étais resté couché devant le curé ; il m’avait
dit « lève-toi et marche », le jour où je m’étais cassé la jambe en ratant la marche de l’autel avec les burettes à la main, à la messe des morts. Je lui avais répondu par un bras d’honneur. Après les scouts, c’est l’adjudant qui gueulait « en avant marche, toute », et il fallait chanter « allons’zenfants etc. … » de la Marcheillaise, tout ça à marches forcées, forcément. De retour à la vie civile, j’en rêvais la nuit, de la marche : tous les jours, les clients venaient : « ça ne marche plus, Monsieur le mécano, ça marchera demain ? » , « Mais ça marchera, bien sûr », et ça ne marchait souvent plus de tout. Du coup, je restais le dimanche entier au lit. Défense de marcher. Et puis j’ai vu de moins en moins de monde : ça ne marche plus ? On jette. On ne pose plus de question. Plus de doute. Ça ne marche plus, on JETTE. Et moi avec. Alors j’ai pris un bâton de pèlerin. J’ai marché jusqu’à plus soif. Marcheur immobile, j’ai tout de même usé jusqu’à mes plantes de pied ; c’est pourquoi je suis dans un fauteuil, je n’ai plus de pieds.
Ça m’embête, parce que pour finir en beauté, je voulais franchir la Manche sur un fil et sauter en route. Mais je n’ai plus de pieds. Alors je me suis mis dans un fauteuil ; lui, il marche
très bien. Jusqu’à ce que je n’aie plus de mains pour pousser les roues. Alors plus personne ne pourra dire « qui va là ? »
Catherine de Lagabbe
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